Le vainqueur de la Solitaire 2003 a pris la tête de la course avec son compère Nicolas

Photo : Ch.Guigueno / Pipof.com/voile

Au nord, c’est nord ! Damien Grimont (Gédimat) ne cache pas la vérité et avoue qu’il préfèrerait traîner dans d’autres quartiers, ceux du sud notamment, où ses habitants (de passage) ont pu attraper les alizés au vol dans leurs voiles : « On est au nord, malgré nous, c’est plus les autres qui ont fait une option en plongeant et je suis en train de penser qu’ils ont eu raison de le faire », lance-t-il depuis le seul monotype Monotype #sportboats resté dans les parages des 27^es nord quand Groupe SCE-Le Télégramme a mis les voiles du côté des 22^es nord. « Ce n’est pas perdu pour autant, il reste 1000 milles, l’équivalent de la première partie du parcours. On marche à 7-8 nœuds, dans un vent au 90 (d’est)... Mais c’est sûr, les autres ils décollent. Je pense que Groupe SCE est bien placé pour la suite et puis il y toujours Banque Populaire dont il faut se méfier. Ils vont tellement vite de toutes façons, que n’importe où ils sont, ils sont dangereux ! »

300 milles plus bas et à 1000 milles de la piste d’atterrissage antillaise, les propos de Damien Grimont sont confirmés en direct. Le dernier vainqueur en date de la Solitaire, et son acolyte Nicolas Troussel, se sont effectivement propulsés en tête et ont grignoté avec l’appétit de deux ogres le retard de plus de 30 milles qu’ils accusaient hier sur les leaders de la veille. Autant dire qu’ils se font la belle. « Notre option paie, on a des alizés depuis hier matin. On n’a pas eu de moments de doute, on avait étudié la météo de près, on était confiants ce qu’on avait prévu arrive. Il reste cependant beaucoup de chemin à parcourir. Une dépression se crée devant nous, il va falloir faire attention. Mais on a des bons moments sur l’eau depuis le début, les bonshommes vont bien... », lâche depuis le nouveau bateau de tête Armel Le Cléac’h.

Dans son sillage, difficile de tenir le rythme et seule la paire de Banque Populaire tient la cadence à 6 milles derrière. « Il n’y a rien de miraculeux dans tout ça et je ne suis pas surpris de ces nouveaux classements... vu ce qu’on bosse ! C’est vrai qu’on n’a plus d’électronique et que ça nous rend peut-être plus lucides. On écoute Arielle Cassim de RFI. On a pu se faire un petit scénario pour la fin et on le remettra en cause tous les jours », explique quant à lui Pascal Bidegorry, décidément très en forme depuis qu’il met tous ses sens - flair marin compris - en éveil.

Les classements se suivent et ne se ressemblent pas depuis que le sud a mis les voiles. Mais si certains - les sudistes de tête - récoltent à présent les fruits de leur option, d’autres tardent à mettre le vent de la réussite dans leurs voiles. Le duo de D’aucy (Jourdren-Mourniac) qui pointe à la 19^e place espère que son heure a bientôt sonné et que le décollage des premiers annoncent celui des autres. « On est quasiment sur la route directe depuis hier, à 18 heures, donc ça va dans le bon sens après avoir beaucoup perdu dans la pétole... Ceux qui sont au nord à l’instar de Gedimat ou de Cercle Vert n’ont pas fini de souffrir, estime Bruno Jourdren. L’approche sur les Antilles se fera par le sud. Au nord, ils vont avoir des trous de vent et se retrouveront au près. Nous avons 170 milles de décalage en latitude par rapport à Cercle Vert, c’est énorme ! Il va bien falloir que ça se comble ! » D’aucy, légèrement plus au nord que les nouveaux leaders, devrait toucher les dividendes de son option avec un peu de décalage par rapport à ces premiers. Reste à connaître ce que va réserver la météo et à quelle sauce tropicale elle va bien manger les duos en approche des Antilles. Entre un petit système qui menace de montrer le bout de son front et de semer des zones sans vent et les alizés qui ont l’air, cette fois, de faire plus de zèle (15-20 nœuds d’est), plusieurs scénarios se dessinent et la partie reste ouverte. Mais c’est par le sud que se rapproche aujourd’hui l’arrivée...   L.F

Echos du large

 Rodolphe Jacq, Skipper AG2R : « On est sur une route médiane (vers les 24° nord, ndlr) et ça paie car le système météo a considérablement évolué ces dernières quarante-huit heures, avec une dépression qui arrive sur les Antilles, qui n’était pas prévue au départ qu’on a détectée sur notre fax météo. Conséquence : Nous avons 24 nds de vent contre 12 à nos adversaires qui sont maintenant obligés de se recaler sur notre position et qui devraient encore perdre du terrain dans les prochaines heures. Il reste encore une semaine de course, on continuera de se battre pour rentrer dans les huit premiers en gagnant centimètre par centimètre. On vient de doubler Eric Drouglazet et Marc Thiercelin (Triskel-Brokerline), notre prochain objectif : passer devant l’équipage de Coupechoux ! »

 Yannick Cano (Béziers Méditerranée) : « Oui, on est 23^es. mais non, on n’est pas au rythme méditerranéen. Que les choses soient claires : si y’a des gens qui travaillent dans des conditions difficiles, c‚est bien établi, ce sont les méditerranéens ! Et je vous assure qu’on ne fait pas la sieste : on est sur le bateau jour et nuit, mais ça ne paye pas... encore. Mais on peut encore espérer pas mal de choses de la course : déjà continuer à se faire plaisir et puis surtout gagner pas mal de places. Déjà parce qu’on est décalés au sud. Ca paye pour ceux de devant et maintenant faudrait que ça marche pour nous aussi. Y’en a marre de payer pour les autres, on compte bien passer à la caisse à notre tour ! Il reste une semaine de course, c’est long et il peut se passer encore beaucoup de choses... »