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Solitaire Afflelou Le Figaro

Ils ont passé le cap de l’enfer !

Liz Wardley : « je me suis retrouvée sous l’eau accrochée par mon harnais »

vendredi 17 août 2007Christophe Guigueno

La troisième étape de la Solitaire Afflelou Le Figaro avait commencé dans la pétole à la sortie du goulet de Brest Brest #brest . Elle a terminé dans le gros baston au large du cap Ortega, juste avant le cap Finisterre. De retour à terre, les marins – régatiers nous racontent ce qu’ils ont vécu, que ce soit le gros danger comme Wardley ou Chabagny, le respect pour Mouren ou la beauté des éléments pour… Desjoyeaux.

Fort heureusement, l’organisation Organisation #organisation de la course en solitaire n’a eu à déplorer aucun incident. Ceci grâce au bateau, le Figaro-Bénéteau qui, avec ses dix mètres de long et son haut franc-bord, passe tel un 4x4 des mers dans toutes les conditions. Mais aussi et surtout grâce au grand sens marin des navigateurs. Et lors des dernières 24 heures 24 heures Record de distance parcourue sur 24 heures de course, alors que la régate battait son plein avec pour enjeu la victoire d’étape à La Corogne et sans doute le podium final aux Sables d’Olonne, beaucoup ont su lever le pied… pour en finir, en toute sécurité

Mais cela n’a pas été de tout repos entre les pannes de pilotes automatiques, des voiles déchirés, etc. et surtout quelques grosses frayeurs comme pour Thierry Chabagny qui se réveille dans l’eau, le bateau à contre ou pire, la Papoue Liz Wardley éjectée et sauvée par son harnais. Et une fois arrivés en Espagne, les héros nous racontent [1] ces moments forts d’une étape d’anthologie.

Liz Wardley (Sojasun), 21e de l’étape : « Dans un saut de vague, je me suis fait éjecter et je me suis retrouvée sous les filières, sous l’eau accrochée par mon harnais. C’est la même vague qui m’a remise dans le bateau. J’ai eu très peur. Après ça, je me suis assise dans le cockpit, j’ai pleuré pendant 10 minutes, j’ai crié. Puis j’ai fini par repartir pour me remettre dans la course. C’était pas très cool. Au final, j’ai pris cher au général, mais je suis assez contente de la manière dont j’ai navigué. Ce n’est pas fini, il reste encore une étape. »

Thierry Chabagny (Brossard), 17e de l’étape « Pendant les dernières heures de course, je me suis cru au front, avec les sacs de sable et ma mitrailleuse, à me prendre un tas d’obus sur la gueule. Pour ne pas me faire éjecter par les vagues quand j’étais à la barre, je m’étais ceinturé avec la longe du harnais. Mais malheureusement, j’ai fait un manque à virer et je me suis retrouvé sous le vent, attaché, en moitié dans l’eau…Je me suis fait une grosse frayeur... »

Corentin Douguet (E.Leclerc/Bouygues Telecom) vainqueur de l’étape, 2e au général provisoire : « Des heures et des heures dans 40 nœuds au près, c’était l’enfer. C’est quand même des petits bateaux, il y avait une mer dégueulasse et on s’est vraiment fait mal. J’ai même failli lâcher le morceau. Ce n’était pas tant le vent, il y avait 40 nœuds, c’était la mer qui était super violente. La longe de harnais, je m’en suis servi pour faire une ceinture pour ne pas me faire éjecter du poste de barre. Avec la fatigue, on s’endort un peu à la barre et si une vague arrive, on peut se faire éjecter à travers le cockpit. Il y a un moment où je me suis dit la régate, on s’en fout, faut juste naviguer en bon marin, ramener le bateau et le bonhomme. C’était vraiment ça : naviguer en bon marin et pas se prendre la tête avec la performance pure, parce qu’en ce qui me concerne, ce n’était plus possible. »

Nicolas Troussel (Financo), 2e de l’étape, 3e au général provisoire : « C’était sport, humide. On s’est fait rincer tout le temps. Je me suis maudit d’avoir laissé ma combinaison sèche dans le camion. Et puis c’était des changements de voiles incessants, toute la garde-robe y est passée : 1 ris, 2 ris, 1 ris dans le foc, génois, solent, tourmentin. On a même fini par mettre le spi sur la fin, dans les douze derniers milles ! La nuit, je ne barrais pas parce qu’on ne voyait pas les vagues, en revanche, je barrais toute la journée, de longues heures interminables. Il fallait faire attention au matériel, être vigilant, même dans les manœuvres, épuisant. Il y a eu des moments de lassitude... »

Michel Desjoyeaux (Foncia), 3e de l’étape, leader au général provisoire : « On a été bien servis ! C’est gentil de nous avoir emmené faire ça. C’était animé toute cette manche : du près, du portant, de la castagne. C’était beau, de belles déferlantes dans la lumière du soir. J’ai été un peu devant, un peu derrière… La dernière journée, je n’avais plus de contact avec personne. La mer a été forte à un moment. Pour des Figaro, ça commençait à causer. On a fait quelques beaux sauts de vagues avec tout le bateau qui sort de l’eau. Le bateau arrive à huit nœuds sur la vague et se retrouve devant un grand trou, puis ça retombe et ça fait un grand ‘baaamm’. Ça tape très fort et ça peut être comme ça une fois par minute. C’est le tarif. Pas très agréable, surtout quand on est à l’intérieur du bateau. »

Jean-Paul Mouren (M@rseillEntreprises), 11e de l’étape : « Je retiens de cette étape que la mer, c’est souvent la vraie guerre dans le sens primitif du terme et je trouve que le prix du poisson n’est pas assez cher quand je vois ces chalutiers qui se font chahuter dans des endroits épouvantables à longueur d’année, je suis en admiration devant le métier de marin pêcheur. Les gens qui vont sur la mer sont des gens très spéciaux, c’est un peu comme ceux qui vont dans l’espace, c’est une sorte de 4e dimension. La nature vous remue les tripes, au sens propre et figuré. La mer est d’une puissance terrible, c’est elle qui vous éjecte du jeu Jeu #jeu si elle veut. On voit bien la précarité et la limite de notre libre-arbitre et on se retrouve à gérer son petit patrimoine individuel avec beaucoup d’attention. »

Christopher Pratt (Espoir Crédit Agricole), 13e de l’étape : « J’ai eu pas mal d’avaries. J’ai déchiré la GV au niveau du deuxième ris, ensuite, j’ai cassé l’aérien, donc plus d’info sur le vent et plus de mode vent sur le pilote. Pendant toute l’étape, je me suis dit : « qu’est ce que c’est dur ». Je crois que j’ai jamais fait un truc aussi dur de ma vie. Par contre ce qui est fou, c’est qu’une fois arrivé à terre, 2 secondes après, tu as tout oublié. Je n’arrive plus à me dire que j’ai passé un mauvais moment. Car c’était quand même une étape d’anthologie : 5 jours et 5 nuits de mer avec tout de A à Z, de la pétole, de la baston, le mouillage, le deuxième ris, le ris dans le solent, ça a été une étape extraordinaire. »

Nicolas Lunven (Bostik), 9e de l’étape : « C’était assez sportif, mais tant qu’on n’a pas d’ennui avec le bateau, ça se passe toujours mieux. Souvent, c’est une petite galère qui en amène une autre puis une autre et là ça devient vite l’enfer. Mais moi, ça n’a pas été le cas. J’ai eu de la chance. On a peut-être pas eu tous les mêmes conditions selon notre position. Moi je n’ai jamais eu plus de 40 nœuds de vent… D’autres en ont eu plus. Par contre, il y avait pas mal de mer. »

Frédéric Duthil (Distinxion), 8e de l’étape : « C’était pas très intéressant ces conditions de navigation. C’était du ‘bourrinage’ au près dans 45 nœuds de vent. Je me disais : il va y avoir des gens en vrac parce qu’il y avait vraiment du vent, mais heureusement, tout va bien. J’ai eu des soucis techniques : mes antennes sont tombées, mon solent est mort. C’est casse bateau, casse bonhomme et à la fin tu ne fais plus trop attention à la stratégie. Ça a été plus de la survie, mais bon, voilà, on l’a fait. »

Gérald Veniard : « C’était super dur. Des vagues monstrueuses, déferlantes, et jusqu’à 50 nœuds de vent. J’étais en survie. Ce n’était plus de la course. Je ne comprends pas qu’on nous envoie là dedans. Heureusement, il n’y a pas eu d’accidents graves. Mais côté bateau : Beaucoup de petites choses : le pire c’est la grand voile, elle est pleine de petits trous. Le tissu est mâché. Ce n’est déjà pas évident de trouver les budgets pour acheter un jeu Jeu #jeu de voile neuf par saison. Alors, flinguer une grand-voile en une seule étape, ça fait mal au cœur… J’ai également décollé une varangue et perdu ma girouette. Rien de très grave en soi, j’ai joué la sécurité pour ne pas me prendre mon mât sur la tête ! Et moi, j’ai juste fais une belle chute dans le cockpit, mais rien de grave. J’avais enfilé la combinaison de survie pour rester sec, c’est important. De ce côté-là, c’est plutôt pas mal. » [2]


[1Propos recueillis par le service de presse de la Solitaire Afflelou Le Figaro.

[2Propos recueillis par Catherine Ecarlat / Voyez Large


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