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Trophée Jules Verne

Kingfisher 2 a démâté au large des Kerguelen

Ellen MacArthur : "les larmes me montent de colère et de frustration"

lundi 24 février 2003Redaction SSS [Source RP]

À 22H40 GMT HIER SOIR (dimanche 23 février 2003) KINGFISHER2 A DÉMATÉ - TOUS LES ÉQUIPIERS SONT SAINS ET SAUFS, PAS DE BLESSÉS... Alors qu’il progressait sous grand voile haute et spinnaker dans des conditions modérées de 25-30 noeuds de vent et 1.5 mètre de houle, à environ 100 milles au sud-est des îles Kerguelen, KINGFISHER2 a démâté. Le mât est tombé sans prévenir sur l’avant du bateau, en épargnant les 3 équipiers qui étaient alors sur le pont.

Déception pour l’équipage d’Ellen, le tour du monde se termine à 100 milles des Kerguelen
Photo : Kingfisher Challenges

LE MÂT DE 39.5 MÈTRES DE LONG S’EST CASSÉ À DEUX ENDROITS - LA RAISON DU DÉMATÂGE RESTE INCONNUE... Le mât est tombé sous le vent, à bâbord. Une section de 10 mètres, à la base du mât, a pu être sauvée, ainsi que le maximum de cordages possible, mais le reste du mât, du gréement et des voiles a du être coupé pour éviter d’endommager d’avantage le bateau. Une partie du mât tombé à l’eau a causé un petit trou dans la coque bâbord, mais le bateau ne prend pas l’eau et progresse dans des conditions de mer assez bonnes.

ACCABLÉS, MAIS PROFESSIONNELS JUSQU’AU BOUT, LES ÉQUIPIERS ONT DÉJÀ INSTALLÉ UN GRÉEMENT DE FORTUNE en utilisant la bôme comme mât temporaire... À 02h30 KINGFISHER2 avait repris un peu de vitesse Vitesse #speedsailing et progressait entre 7 et 10 noeuds vers le port le plus proche et le plus facilement accessible, Perth (sud-ouest de l’Australie), à quelques 2000 milles dans leur nord-est. Les 10 mètres de mât restant ont été utilisés pour faire levier et mettre la bôme en place.

BIEN QU’À 100 MILLES DES ÎLES KERGUELEN, la décision fût prise de rejoindre plutôt l’Australie, car Kerguelen ne possède pas les installations suffisantes et le maxi-catamaran a besoin de rejoindre un port également accessible aux cargos pour être ensuite ramené en Europe.

NOUS N’AVONS PAS BEAUCOUP EU DE CHANCE DANS CETTE AVENTURE Aventure MAIS ON S’EST TOUJOURS ACCROCHÉ ET LES CHOSES COMMENÇAIENT À TOURNER EN NOTRE FAVEUR, MAIS MAINTENANT TOUT EST TERMINÉ"... " Nous avons eu beaucoup de déceptions avec la situation météo qui nous a retardé sur le record Record #sailingrecord ... mais tout le monde s’est battu et jamais personne n’a parlé d’abandonner, même dans les moments les plus lents. Les équipiers sont restés optimistes et n’avaient qu’une idée en tête, revenir sur le record Record #sailingrecord . Et ces derniers jours, c’est ce qui s’est passé. Nous sommes passés devant le record de Peyron et nous commencions à rattraper Geronimo, encalminé dans l’Atlantique Sud. Et paf, tout a basculé, tout est terminé. C’est si dur de voir tout ce travail s’envoler d’un seul coup".

KINGFISHER2 AVAIT 332 MILLES (environ 20 HEURES) D’AVANCE SUR L’ACTUEL RECORD D’ORANGE, et avait réduit son retard Geronimo à 2 jours (859 milles). Démâter au moment même où KINGFISHER2 revenait sérieusement dans le match, est un vrai choc pour toute l’équipe... NEAL MCDONALD : "le visage des gars à bord en disait long. Triste et éteint... C’est la fin d’une incroyable tentative de record qui aurait pu être un vrai succés. L’avenir commençait à nous sourire".

KINGFISHER2 N‚A DEMANDÉ AUCUNE ASSISTANCE AUX SAUVETEURS AUSTRALIENS ni autre forme d’aide

LE TROPHÉE JULES VERNE RESTE FIDÈLE À SA RÉPUTATION D’UN DES PLUS DIFFICILES CHALLENGES AUTOUR DU MONDE. À ce jour et depuis sa création en 1993, 8 des 12 tentatives ont échoué. L’actuel record est toujours détenu par Orange (Bruno Peyron) en 64 jours, 8 heures, 37 minutes et 24 secondes. Olivier de Kersauson et son équipage à bord de Geronimo, sont toujours en course sur le Trophée Jules Verne. Mais avec à peine 1 jour d’avance, il est difficile de dire s’ils pourront battre le record.

MESSAGE DE GERRY MURPHY, DIRECTEUR DE KINGFISHER PLC, SPONSOR TITRE D’ELLEN MACARTHUR ET DE LA TENTATIVE DE TROPHÉE JULES VERNE : "nous partageons évidemment la déception d’Ellen et de son équipage en apprenant le démâtage de Kingfisher2. Mais le sécurité et le bien être d’Ellen et de ses équipiers ont toujours été notre principale préoccupation et c’est le plus important pour nous".

"Le Groupe Kingfisher est extrémement fier d’être associé à Ellen MacArthur et à son équipage. Individuellement et en tant qu’équipe. Ils incarnent les qualités et les valeurs que nous recherchons dans notre équipe. Leur détermination, leur talent et leur volonté de réussir sont un exemple pour nous.

Nous sommes certains qu’ils vont surmonter leur déception pour continuer d’avancer vers de nouveaux et de plus grands défis en course au large".

EMAIL D’ELLEN APRÈS LE DÉMÂTAGE

- Je suis assise là à la table à cartes et je ne me sens pas très bien à l’intérieur. Je peux entendre l’eau courir sur la coque, et sentir les vagues porter KINGFISHER2, mais plus à 20 noeuds comme avant. Maintenant, notre aventure Aventure , telle qu’on l’a connue, est terminée.

À 22h22 le 23 février, j’ai senti une secousse qui m’a poussée en avant sur la table à cartes alors que je discutais de la météo avec notre routeur Meeno Schrader. Les secousses en avant arrivent assez souvent sur ce genre de bateau lorsqu’on fonce en descendant les vagues, mais celle-ci était différente, elle était accompagnée d’un bruit perçant, craquant, sec, un bruit à vous tordre violemment les boyaux.

J’ai posé le téléphone et j’ai couru le long du couloir en regardant partout autour de moi pour voir s’il n’y avait pas de l’eau qui rentrait de quelque part. Mais rien. Quand j’ai atteint la descente, tout est devenu très clair et j’ai eu comme une sensation de nausée... le mât de 39.5 mètres, qui nous avait poussé en tête du record après 24 jours de mer, n’était plus là.

On ne saura sans doute jamais la raison de ce démâtage, et quelque part, il faut simplement l’accépter tel qu’il est.

Ce serait tout à fait faux de dire que cette aventure n’a pas été un extraordinaire challenge. À aucun moment de la course je n’ai eu les larmes aux yeux, mais là, à l’instant même, les larmes me montent de colère et de frustration. Pas à cause de tous les soucis que nous avons eu jusqu’à maintenant, mais à cause de la colère qui m’envahit, la colère d’avoir déçu tant de gens. Tant de travail a été investi dans ce projet, tant d’énergie et d’engagement personnel, la moindre pièce scellée, le moindre bout attaché, et voilà où nous en sommes, à couper tout cela et à le laisser partir par dessus bord. C’est tellement destructeur, tellement définitif... c’est terminé...

Donc je suis assise là toute vide et triste, mais avant tout rassurée que personne à bord n’ait été blessé. Et en même temps, je suis assez fière, fière de la force de l’équipage, fière de leur courage et de leur humour, fière de leurs sourires et fière de la façon dont ils ont supporté cette frustration. Le plus étrange, c’est que soudain, bien que nous soyons tous très déçus, nous nous sommes tournés vers un autre objectif, celui de continuer d’avancer et de faire cap sur l’Australie dès que possible.

Je jette un oeil sur mon carnet de notes pour y écrire quelque chose à laquelle je dois penser, et je revois toutes ces pages de détails sur la préparation de ce voyage. Tout de notre aventure semble faire partie du passé, un peu comme un lointain souvenir... Il y a trois heures à peine, on me posait des points de suture sur la main, que je me suis entaillée un peu plus tôt, et il y a une heure j’étais en train de couper le gréement pour le dégager. Tout cela semble si loin. Tous ces jours où nous nous sommes préoccupés de notre distance parcourue ou de chaque aspect de la vitesse Vitesse #speedsailing du bateau. Tout cela est terminé, notre Jules Verne est terminé

C’est vraiment un drôle de sentiment d’être assise là en train de repenser à tout ce qui s’est passé, et à me demander ce qui aurait pu se passer... Il y aura toujours des "et si..." dans la vie. Ils ne disparaîtront jamais mais vous pouvez choisir de les ignorer... Ce qui est fait, est fait. Toutefois, si vous choisissez de les regarder, et d’affronter la réalité, bonne ou mauvaise, vous apprendrez toujours quelque chose, comme nous avons appris.

Information Kingfisher Challenges



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