20h09 : départ ! Bouée de dégagement et long bord de bon plein, route directe vers l’estuaire de la Gironde. La houle est courte, le vent à douze nœuds, les bateaux filent à huit nœuds… Au coucher du soleil, le spectacle est beau. Ombres chinoises dans les voiles. Equipiers au rappel. Un groupe au vent est mené par Purflo – Les Thermes Marins – S^t Malo ; un groupe sous le vent par Mummaduck. Et les milles défilent : très vite, ce sont les iles de Ré et d’Oléron, et le passage, à 3h30, de la bouée d’entrée de chenal N°2 de l’estuaire.

Là, Groovederci passe déjà à l’attaque : il double la marque en tête, bord à bord avec Courrier Dunkerque. Cap sur Royan : la flotte remonte l’estuaire de la Gironde dans un vent faiblissant. Bulle sans air pour l’arrivée, franchie ce matin à 8h. Mourniac sourit : l’étape s’est finie sur « un coup de dés ». Les Américains dépassent les hommes de Daniel Souben à quelques longueurs de la ligne. Ils signent là leur première victoire sur ce Tour de France à la Voile 2010.

A bord du monotype Monotype #sportboats mené par Deneen Demourkas, une cellule arrière tricolore : Mourniac à la tactique, donc, et Christopher Pratt, Figariste et skipper de 60 pieds, à la navigation. « Nous fonctionnons ensemble, nous discutons énormément, » explique Mourniac, lui-même navigateur en Class America, sur le team All4One. « Christopher parle des courants, des pressions. Je me concentre sur notre positionnement par rapport aux adversaires. La base de notre dialogue est française - ça doit être énervant pour les Américains, mais je leur résume ensuite les consignes. Mais je pense qu’il faut féliciter les régleurs et les barreurs. Réussir à faire avancer le bateau dans la pétole est un travail extraordinaire. »

Deuxième, donc, Courrier Dunkerque. Un bon coup pour Souben, qui relègue Nouvelle-Calédonie à la dixième place sur cette manche de coefficient deux. Nouvelle-Cal’ est toujours leader au général, mais les Dunkerquois, deuxièmes, se rapprochent – plus que 24 points d’écart ! Ville de Genève – Carrefour Prévention est sixième aujourd’hui, huitième au général et conforte sa place de leader amateur. Mais Purflo – Les Thermes Marins – S^t Malo menace, fort d’une cinquième place aujourd’hui. CSC – HEC – Ecole Navale, douzième à Royan, est toujours leader étudiant… Mais doit lui aussi se méfier de Team SOG – Safran, très beau troisième de ce ralliement. La moyenne d’âge de cet équipage ? 21 ans ! Ce matin, à Royan, la fougue américaine et la jeunesse trinitaine ont surpris tout le monde. Et c’est tant mieux !

Ils ont dit

 Philippe Mourniac, tacticien de Groovederci : « Nous avons fait une très belle manche. A la bouée de dégagement, nous sommes sixièmes ou septièmes et à partir de là, nous sommes toujours remontés. Nous avons quasiment fait tout le chenal en tête avant de nous faire doubler par Courrier Dunkerque. Cela a fini de façon un peu épique ! A bord, nous essayions de faire le moins de mouvements possibles, de déterminer si nous étions bâbord ou tribord. Le navigateur avait les yeux collés sur l’ordi pour voir si nous continuions à avancer. Nous étions forcément un peu nerveux ! Mais nous gagnons, nous passons la ligne en premier, et c’est le plus important. Deneen avait déjà fait le TFV en 2004, elle n’avait jamais gagné d’offshore. Ce n’est jamais facile et quand on en gagne une, il faut en profiter. »

 Jérome Vaudelet, tacticien de Purflo – Les Thermes Marins – S^t Malo : « Grâce à un bon bord de dégagement, nous avons mené longtemps. Ensuite, c’était du tout droit et nous avons réussi à contenir la flotte jusqu’en milieu de nuit. Là, cela a été plus compliqué. Il y a eu de la molle, des changements de voile, et nous avons été moins réactifs. Nous avons perdu quelques places. Et pendant l’arrivée à Royan, dans les courants, les bancs de sable et entre les bouées, nous avons perdu et repris. Finalement, cinquièmes : nous sommes très contents. C’est une super bonne place à prendre, une étape marathon. Hier matin, nous avons fait un footing en ciré sur le stade pour perdre un peu de poids. Puis deux manches bananes à fond, pas d’assistants et un équipage très réduit pour le ralliement : nous sommes fatigués ! »

 Arthur Leopold Léger, numéro un de Team SOG – Safran : « La nuit a été assez longue. Nous avons pris un très bon départ et ça a déjà été assez chaud sur le bord de près. Huit ou neuf à la bouée au vent. Pendant le long bord, nous avons repris des places jusqu’à être quatrièmes. Dans le chenal, une quinzaine de bateaux sont passés et nous avions un peu la haine… Nous avons tout donné sur le reste, dans les mistoufles, dans la pétole, dans les petites risées pour revenir. Ce qui nous permet de finir troisièmes in extremis. Nous sommes vraiment revenus de loin ! La suite du TFV ? Nous sommes sur-motivés ! Il faut continuer à être rigoureux, persévérant, et ne rien lâcher. C’est là que ça paye, nous l’avons encore vu aujourd’hui. »